Par Galya ORTEGA.

Le nom même de spa consultant ne veut rien dire. C’est un fourre-tout où on trouve souvent une véritable expertise et parfois une arnaque concrète. Comment s’y retrouver ? Le diplôme de spa consultant n’existe pas. Le métier s’est construit au fil des années depuis 20 ans.

Avec le spa, les différents acteurs ont émergé au fur et à mesure des besoins. Parfois, il s’agissait de salariés qui mutaient vers le consulting. Parfois, il s’agissait de personnes qui ont construit une véritable compétence. Parfois, il s’agissait d’opportunistes qui se sont arrogé le titre et se sont positionnés sur le marché avec un don commercial certain. Le manque de capacité étant évident, ces faux experts embauchaient à leur côté un « assistant » qui avait la qualification et restait dans l’ombre.

UN MODÈLE ISSU DES ÉTATS-UNIS

Lorsque les spas ont émergé aux USA, bien avant l’Europe, il y eut besoin de personnes qui étaient capables de concevoir la totalité d’un projet spa : faire formuler le concept du spa au propriétaire, élaborer les détails du concept, trouver les produits ou la marque de cosmétiques, travailler de concert avec l’architecte et l’architecte d’intérieur afin que les bases qui vont faire un spa efficace et rentable soient respectées, puis le recrutement, la formation et l’assistance à l’ouverture.
Le métier était ainsi au début : « l’homme à tout faire », le maître d’œuvre. C’était ça un spa consultant.
Lorsque le spa est arrivé en Europe, personne n’avait cette compétence. Je me souviens, car ce n’est pas si ancien, combien de personnes ne savaient même pas ce qu’était le spa. À présent, en France, il y a autant de besoins de consultants que de spa consultants. Et parfois c’est bien car cela signifie que ce sont en principe de vrais experts de ce qu’ils vendent. Mais ce n’est pourtant pas si simple. Tentons d’y voir plus clair.

ENTRE STATUT SOCIAL ET SAVOIR-FAIRE

Dans le monde du travail, il y a :
– les salariés : ils appartiennent à une entreprise qui a une spécialité (architecture, décoration, audits, création, formation, marque de cosmétiques, opérateur, etc.),
– les « professions libérales » et depuis quelque temps les « auto-entrepreneurs » : on nomme toute cette catégorie : les indépendants,
– les chefs d’entreprise,
– et les créateurs de spas : ils peuvent être hôteliers, propriétaires, marques de cosmétiques, etc., en termes de statut social.
Les employeurs apprécient de ne pas avoir un salarié à plein temps et de choisir parmi les différents consultants en payant des honoraires mais sans engagement financier sur le temps.
Beaucoup de consultants sont d’anciens salariés qui avaient de vrais postes avec une vraie compétence. Les voilà licenciés et en recherche d’emploi.
La solution : devenir consultants indépendants, d’autant plus qu’ils sont souvent appréciés de leurs anciens clients… qui deviennent leurs nouveaux clients.
J’ai connu ainsi plusieurs excellentes directrices de formation ou directrices marketing de marques qui deviennent spa consultantes et font un super travail ensuite pour aider les spas à se positionner stratégiquement ou bien qui aident des jeunes marques de spa à se développer et s’implanter. La compétence est là. Et la disponibilité également.
J’ai connu des spa managers de grande qualité qui, au chômage, se font une spécialité de conduire des ouvertures de spas avec brio.
Mais, parmi ces spa consultants, il y a de tout. Des personnes qui pensent que c’est facile et qui font perdre beaucoup d’argent et de temps à leurs clients. C’est comme cela ! Beaucoup d’employeurs sont très amers car conscients de s’être fait avoir. Seule solution pour eux : se renseigner précisément sur les personnes, croiser les informations avec lucidité. Méfiez-vous des attitudes séductrices.

SECRETS DE RÉUSSITE

J’ai souhaité ici vous apporter les secrets de réussite et les signaux d’alarme concernant les spa consultants. Pour cela j’ai fait appel à ma propre expérience, mais j’ai aussi enquêté auprès de Christine Masson Nicollier, Tiphaine Modeste, Sophie Demaret.

Secret N°1
On n’est pas au top de soi-même avec tout le monde !

Donc, il faut apprendre à bien se connaître soi-même : ses qualités originales que personne d’autre n’a, son fonctionnement de créativité ou de travail, évaluer son vrai savoir-faire et connaître ses lacunes. C’est très important pour la réussite d’une mission. Ensuite ne pas prendre aveuglément tous les clients qui se présentent (il faut en avoir les moyens financiers, je sais). Faire son choix de clients en sondant en soi-même avec qui on va s’entendre et avec qui cela ne marchera jamais. Pourquoi aller au-devant d’un échec ? Il y a des dossiers à refuser, à cause des interlocuteurs impliqués ou quand le projet en lui-même est tellement bancal qui est impossible à mener à bien correctement.
Pour être un bon spa consultant, il est vital d’être lucide et de savoir au plus vite les chances de réussir. Le souci est qu’on ne sait pas tout cela d’emblée. C’est l’expérience et le temps qui déclenchent l’intuition plus ou moins rapidement.

Secret N°2
Être clair avec ses propres motivations

Cette règle est très importante car, dans ce métier, il y a des hauts et des bas. Être lucide avec la source de ses choix donne de la force et du courage quand ça va moins bien. Les motivations qui conduisent à s’engager dans ce métier sont très variées. Je sais qu’en ce qui me concerne, la sensation de liberté, et le goût du changement sont mes motivations principales. J’ai été salariée avec un bon salaire qui m’apportait de la sécurité financière et un cadre prestigieux et rassurant. Le jour où je me suis retrouvée à nouveau libre, j’ai pris un grand bol d’air en ouvrant à nouveau mes ailes. Enfin ! je choisissais avec qui j’allais travailler, à quel rythme. Enfin, j’avais le pouvoir de l’experte qui pouvait affirmer sa compétence sans courber l’échine sous les besoins de la « politique » de la Maison. Mais quel luxe ! Pour rien au monde je ne reviendrai en arrière malgré les aléas financiers qui sont revenus avec le statut. J’ajoute que, pour une créatrice, être sollicitée sur des projets émergeants, avec des créateurs de spas qui rêvent et qui veulent un consultant pour les aider à donner corps à leur vision, c’est magnifique.
Christine Masson me citait deux motivations principales : « Accompagner des spa managers qui sont trop juniors ». Je la comprends, et cela lui ressemble bien. Lorsqu’elle fait des pré-ouvertures de spas, elle sert de tuteur et permet au client d’être efficace beaucoup plus vite dans la réussite de son projet.
Elle cite également « son goût du partage de connaissance ». Là aussi, j’approuve. Pour elle qui a une belle expérience et qui l’a synthétisée, elle a envie de la distribuer. Je pense que pour un client c’est une manne que d’avoir quelqu’un d’expérience, ponctuellement. Cela lui fait gagner beaucoup de temps et d’efficacité pour son spa.
Une autre cite la même motivation « le goût de transmettre son savoir et son expérience ». Voilà un secret de réussite qui fait réfléchir et qui motive. Cela vaut le coup de se demander vraiment ce qui nous fait choisir ce métier. Et toutes les motivations sont bonnes. J’ai entendu des réflexions faites par des anonymes qui sont recevables et très intéressantes comme « Pour gagner plein d’argent. Je ne gagnerai jamais autant en étant payée au SMIC dans ma boite » ou bien « Pour être connue et me faire un nom dans le métier, car en tant que salarié on n’existe pas à l’extérieur, c’est la société qui est mise en avant. Je veux être une star du spa ! ».

Secret N°3
Anticiper les dépenses et les rentrées

La particularité du métier d’indépendant, c’est qu’on paie soi-même ses charges et qu’on gère sa comptabilité. Or, même si les missions sont régulières, les règlements tardent parfois à rentrer en encaissement.
Les spas qui n’ont pas beaucoup de trésorerie ont tendance à traîner pour régler les factures. Après avoir été recrutée comme une experte, une star, vous devez « mendier » un règlement de facture qui n’arrive pas.
Par ailleurs, les organismes de financement de formation prennent parfois jusqu’à 6 mois après la fin de la prestation pour payer la facture. Ceci est illégal mais il y a des astuces dont ils se servent. J’en ai fait personnellement souvent l’expérience. Donc, on a beau planifier ses rentrées financières, il est compliqué de gérer les encaissements. Le secret est d’avoir toujours une réserve de trésorerie.
Ensuite, les charges sont lourdes et il s’agit d’anticiper URSSAF, TVA, caisse de retraite, etc. Tout cela peut se révéler très lourd si on ne l’anticipe pas. Et quand on est sous pression du manque financier… la créativité s’envole. On est ramené brutalement à la dure réalité. Et hélas, la programmation des charges diverses est souvent décalée par rapport aux véritables rentrées et c’est un casse-tête d’équilibre.

Secret N°4
Croire en soi, ne jamais lâcher

Quand on est consultant, une grande partie du succès repose sur vous. Oui bien sûr, vous avez un savoir-faire. Mais d’autres ont le même. Même si vous avez une spécialité, vos concurrents en maîtrisent au moins une partie. Donc, la valeur ajoutée, c’est vous, avec votre caractéristique personnelle, votre part de spécialité professionnelle et puis… VOUS. Donc, vite, guérissez de votre manque de confiance en vous. Soyez lucide : il y a vous, votre intimité, votre programme de vie intime d’une part et ce que vous êtes socialement où vous avez un rôle fondé sur une compétence d’autre part. Et dans notre société, vous êtes en quelque sorte un « produit ». On peut espérer que les deux aspects de votre personnalité sont les plus proches l’un de l’autre. Sinon cela conduit au grand écart. Mais parfois, on ne peut faire autrement. Donc, ainsi que le dit Sophie Demaret « Croyez en vous et ne cédez pas sur l’essentiel. Ne capitulez pas sur ce que vous êtes ».

Secret N°5
Faire son propre commercial

Lorsqu’on est indépendant et en particulier spa consultant, on doit aller chercher ses clients. Sophie Demaret vous conseille « Se faire connaître lors du Congrès International d’Esthétique & Spa et de salons professionnels, rencontrer les marques, se former un maximum afin d’avoir un éventail de connaissances produits ». Il y a plusieurs méthodes qui conduisent à se vendre et avoir des missions. Comment se faire connaître ? Comment se faire identifier comme une experte ? Tisser un réseau. Rencontrer les gens, faire des conférences, se faire interviewer dans des articles importants sont des voies possibles, communiquer sur les réseaux sociaux. Mais la meilleure publicité, ce sont vos clients contents de vos services qui vous la feront.
Ce conseil de faire son propre commercial est un vœu pieux car on peut être un excellent consultant avec une véritable compétence et être discret, introverti et ne pas savoir se vendre soi-même.

Secret N°6
Se cultiver sans cesse

Lorsqu’on est spa consultant dans un secteur en évolution constante, on se doit d’avoir une longueur d’avance. Toujours ! C’est pour cela qu’on vous apprécie. Donc, soyez à l’affût de tout ce qui paraît et même sondez les tendances. Réfléchissez, soyez sans a priori, écoutez des conférences, faites des stages. Être au courant de tout ce qui se fait est obligatoire. La routine n’existe pas dans ce métier. Ou vous avancez ou vous êtes dépassé et donc rapidement vous n’avez plus de vrai travail intéressant.
En même temps, Sophie Demaret conseille « d’apprendre par soi-même ». C’est une grande différence avec ce qui se passe lorsqu’on est salarié où l’on fait des formations programmées par la société et où concrètement tout le temps est consacré à l’entreprise dans un cadre d’une stratégie interne.

Le spa consultant se doit d’avoir une longueur d’avance

Secret N°7
Apprendre à se reposer et à se ressourcer

S’il n’y prend garde, le consultant travaille tous les jours et le soir très tard. Souvent, il cumule en même temps plusieurs missions et donc souvent le surmenage est au rendez-vous. Physiquement, la fatigue devient chronique. Dans la mesure où il n’y a pas de congé de maladie, il avance systématiquement. Psychologiquement, il peut y avoir saturation également. Il est très important de ménager de vrais temps de repos. Pour cela, il s’agit de se détacher de la peur du vide que produit la non-activité, et de la peur du manque car quand on est indépendant, être « improductif » signifie moins d’argent.
C’est toute une gestion que d’équilibrer sa vie entre activité et repos. Il y a quelques années, j’avais trouvé la solution : je travaillais à fond sans état d’âme, mais je prenais une semaine de vacances toutes les cinq semaines et je sortais de Paris pour être certaine de ne pas céder à la pression. J’étais très équilibrée.
L’histoire du ressourcement est subtilement différente : nous sommes au-delà du repos qui régénère le corps et le système nerveux. Le ressourcement va nourrir l’âme et apporter de la nourriture subtile à la racine de son être. Il se fait par la méditation, la retraite de silence, une thérapie énergétique, ou parfois des séances de coaching. Le principe est de retrouver une sérénité ou une vitalité afin de vivre son métier avec tranquillité et épanouissement vrai.

Secret N°8
Ne pas craquer après de mauvaises expériences

Certaines missions se passent mal : échec de la mission, confrontation avec des clients négatifs, grosses difficultés financières, isolement. Parmi les mauvaises expériences, Sophie Demaret nous cite « La manipulation du client qui nous fait miroiter une mission et profite des informations que vous allez lui livrer naturellement. Parfois il s’agit de conseils stratégiques importants. Et il arrive qu’après avoir livré vos secrets, le client ne donne pas suite à la mission qu’il va soit réaliser en interne, soit confier à votre concurrent qui sera moins cher ».
Une mauvaise expérience peut être source de déprime ou de découragement. Or, un consultant peut difficilement craquer et se laisser aller. La créativité a besoin d’un contexte psychologique harmonieux. On peut être un peu malheureux, mais pas craquer. Lorsqu’on a une « traversée du désert », il faut savoir panser ses plaies, guérir de ses blessures éventuellement, tirer les vraies leçons avant de corriger et repartir.

Il est essentiel de se ressourcer pour nourrir la créativité

Si vous devez arrêter et quitter ce métier, mon conseil est de le faire non pas après un échec mais après une victoire. L’après expérience sera beaucoup plus positive pour vous.

Secret N°9
Savoir faire le deuil de missions longues

Ce secret-là m’est venu après une de mes plus grandes frustrations. Souvent on vous confie une mission de consulting parce que personne en interne ne sait faire ce que vous faites. Vous y mettez tout votre cœur et votre énergie, vous construisez, vous formez, vous donnez des idées, vous vous comportez comme si c’était votre affaire à vous. Et juste avant le lancement ou juste après, votre mission est terminée et vous quittez la scène parce que c’est normal. C’est fini. Le temps passe et vous entendez parler de la réussite, vous êtes fière mais quelque part vous n’êtes pas associée publiquement ou avec l’équipe à cette réussite. Avec le temps, si le spa a besoin à nouveau d’un coup de main, ou bien il fera appel à vous ou non. Parfois c’est un collègue qui prend la suite.
Il y a un vrai deuil à faire d’emblée. Il faut savoir que c’est ponctuel, pour ne pas être bêtement dans le reproche et l’attente, être en même temps détachée et totalement investie dès le premier moment. En ce qui me concerne, j’ai une formule lorsque je suis dans la négociation d’une mission, je dis « J’aime les histoires d’amour qui durent ». C’est clair, j’ai besoin d’avoir de l’amour pour le projet pour être inspirée et j’ai besoin de m’inscrire dans le temps pour être au mieux de mon travail. Je me sens authentique ainsi, et c’est de cette façon que j’ai eu certains clients pendant 10 ans avec une mission chaque année.

Si vous devez arrêter et quitter ce métier, mon conseil est de le faire non pas après un échec mais après une victoire

Secret N°10
Savoir gérer la solitude

C’est une question très importante. Je connais beaucoup de personnes qui pourraient être d’excellents consultants mais qui ne sautent pas le pas car ils ont besoin d’une équipe constituée, de celle qu’on a en entreprise avec les gens de son service. En tant que consultant, on est entouré de pairs, de gens qui sont comme vous, ce qui est très riche car si on choisit bien ses interlocuteurs, les échanges sont très productifs et la complicité appréciable. Mais, malgré tout, pour ce qui est de son travail, de ses responsabilités, de ses choix, on est seul ! Et ça, il faut l’intégrer et le gérer.
J’aimerais à présent citer Tiphaine Modeste : « Mon secret de réussite personnel est le suivant : je crois vraiment que cela tient du fait que j’ai occupé tous les postes dans un spa : praticienne, réceptionniste, assistante et manager. Et à chaque fois, une grosse remise en question car je voulais bien faire et je cherchais toujours des techniques et des schémas de réussite à mettre en application. Le plus difficile a été d’occuper le poste de manager. Ce poste m’a vraiment poussée dans mes retranchements. J’ai eu la chance d’avoir un mentor (Valérie Delforge) qui m’a aidée à trouver les bons outils de terrain, qui fonctionnent pour gérer une équipe et développer l’activité d’un spa. C’est véritablement le travail que nous avons réalisé toutes les deux qui m’a permis de réussir. Aujourd’hui, je continue à travailler avec Valérie car nous développons tous les modules de formations ensemble et nous co-animons tous nos séminaires de formation ».

EN CONCLUSION

Les secrets vous en avez à présent et chaque spa consultant, s’il veut bien, vous livrera les siens. Mais j’ai une question : c’est quoi la réussite en ce domaine ? Ça c’est une vraie question à laquelle vous seul pouvez répondre. Ce sera le 11ème secret.