Par Michèle de LATTRE. Maxime Wucher 40 ans, et Marie Bonnard 35 ans, frère et sœur, sont les dirigeants, avec le mari de Mathilde, restaurateur et chef, du Parc Hôtel à Obernai, près de Strasbourg. L’hôtel possédait un petit spa de 500 m2. Aujourd’hui, le nouveau spa s’étend sur 2500 m2. Il a coûté 11 millions d’€. C’est du jamais vu, stupéfiant, merveilleux… les mots nous manquent… Marie Bonnard, la Directrice du Parc Hôtel, nous raconte cette aventure. Avant d’être les dirigeants du Parc Hôtel, Maxime et Mathilde ont fait l’école hôtelière à Lausanne et Strasbourg, puis Maxime est parti à Singapour pendant dix ans, et Mathilde a travaillé à Las Vegas et Dubaï. LE CONCEPT DU SPA Tout d’abord, Yonaguni est le nom d’une cité engloutie au large du Japon. Nous avons choisi ce nom parce que c’était très mystérieux pour nous, il y a une idée de découverte, d’évasion. Nous avons choisi de surfer sur ce mythe et de créer le mystère. Notre spa est particulièrement innovant. Nous voulons que nos clients soient surpris, qu’ils n’aient jamais vu ça ailleurs, et qu’ils passent un très bon moment. Pour nous, c’est ça le principe. UN SPA INCROYABLEMENT INNOVANT Il est surtout innovant par rapport à la baignade, au bassin que nous avons créé de toute pièce, au labyrinthe qui a donné du fil à retordre à tous nos ingénieurs. Nous avions une idée avec Maxime : nous voulions que les clients puissent avoir une expérience de baignade unique, nous voulions inonder tout un étage, nous ne voulions pas faire plusieurs bassins. Nous voulions vraiment que toute l’expérience se fasse sans jamais sortir de l’eau, et avoir ce côté un peu mystérieux, passer d’une salle à une autre, aller dehors, recevoir des cascades, des jets, avoir des surprises, profiter de toute l’expérience sans jamais avoir à sortir de l’eau. Et, surtout, j’adore le côté mystérieux, aller dans des couloirs, sans savoir où on va, se perdre un peu. C’est un labyrinthe et c’est vraiment là-dessus que nous avons mis l’accent. DE 500 À 2500 M² En 2015, nous avions un petit spa de 500 m2. La tendance en Alsace était de développer de grands spas, probablement à cause de l’influence de la Forêt Noire, des bassins Rhénan, de l’Autriche, des pays qui ont déjà développé le concept de grands spas. Donc, nous avons été inspirés par ces établissements et nous ne voulions pas rater le coche. De toute façon, il fallait dynamiser l’hôtel, c’était nécessaire. Nous n’avons pas choisi de transformer notre spa actuel, au contraire de nos autres confrères, nous avons choisi de créer un autre bâtiment, une vraie destination. Aujourd’hui, notre spa fait 2 500 m2 et le labyrinthe fait 330 m2. Il n’y a qu’un seul bassin. Nous avons gardé notre spa de 500 m2, réservé uniquement aux clients de l’hôtel et à leurs enfants qui peuvent profiter de la piscine. DES CLIENTS TOUJOURS EN ATTENTE D’INNOVATIONS Ils sont constamment en attente d’innovations ! Donc, il fallait que l’on crée quelque chose de nouveau : avec le bassin, mais aussi avec l’architecture. Nous avons choisi de ne pas être dans le concept alsacien : nature, local. Nos lignes sont très minimalistes, nous avons travaillé avec des matériaux bruts, la pierre, le bois, mais ce n’est pas froid, il y a tout un jeu d’éclairages. Nous avons voulu que ce soit très intimiste. Et que cela inspire l’évasion, les voyages, le lointain. Chaque élément de ce spa est réfléchi pour qu’il soit innovant. Nous avons réfléchi à tout. Ainsi, le sauna finlandais possède des alcôves pour permettre l’intimité de nos clients et qu’ils puissent vivre l’expérience à deux, en couple, entre deux amis, et qu’ils ne soient pas mélangés à tout le monde. DES IDÉES DU MONDE ENTIER ! Pour créer ce magnifique univers, la majeure partie des idées viennent de Maxime. Après, nous avons travaillé ensemble. Nous avons beaucoup voyagé. Nous avons vu des centaines de piscines à travers le monde, des centaines de spas. Nous nous sommes beaucoup inspirés de ce qui se faisait ailleurs. Après avoir rassemblé un peu toutes les idées, nous avons concocté notre spa à nous. Tout cela vient beaucoup de Maxime, de nos expériences personnelles, de nos parents. Nos parents, eux aussi, ont parcouru tous les hôtels du monde entier, et nous ont apporté leur touche. C‘est vraiment une affaire de famille. Nous avons travaillé avec l’architecte qui avait déjà réalisé tous les travaux depuis 30 ans. Nous lui avons un peu cassé la tête pour qu’il construise notre spa. Nous lui avons dit : « On veut ça ! ». Il n’avait jamais fait ça avant. Nous avons cherché des ingénieurs, des techniciens spécifiques. Nous sommes allés en Autriche pour rencontrer le technicien qui nous a fait le bassin et aussi toute la technique, mais c’est nous qui avons dessiné la structure avec notre architecte. Donc, nous avons cherché vraiment toutes les idées, nous avons vraiment creusé. AUJOURD’HUI DEUX SPAS Il y a un pas de géant entre l’ancien spa de l’hôtel qui est toujours ouvert, l’Asian Spa, et le Yonaguni Spa. Le but, c’est de faire la différence entre les deux spas. Ce nouveau spa a été créé pour aller de l’avant. Notre premier spa était déjà précurseur à l’époque, dans les années 80. Nous étions innovants, nous étions les premiers à avoir une piscine intérieure dans un hôtel et nous étions les premiers à avoir un spa. Dans les années 2000, nous l’avons relooké et nous lui avons redonné un petit coup de rafraîchissement. Mais, maintenant, ça ne suffisait plus, il fallait aller beaucoup plus loin, en construisant toutes les nouvelles entités. Nos clients de l’hôtel apprécient notre ancien spa, L’Asian, qui leur est spécialement réservé. Il a une certaine intimité, c’est un spa familial, où les enfants peuvent venir, car ils ne sont pas acceptés au Yonaguni. Il a son cachet et possède tout ce qu’un spa peut proposer : sauna, hammam, bain bouillonnant, une jolie piscine. Les enfants ne sont pas lésés. Ce diaporama nécessite JavaScript. UN INVESTISSEMENT DE 11 MILLIONS D’EUROS C’est nous qui avons fait cet investissement. Nous avons eu une petite subvention de la région mais ce n’est pas ça qui nous a aidés le plus. C’était vraiment nous, nos investissements. Donc, c’est une très grosse trésorerie pour un établissement familial comme le nôtre. Nous ne savons pas du tout quand nous allons récupérer notre investissement. C’est difficile à dire car nous n’avons pas encore eu une année complète d’activité à cause du Covid. Nous ne pouvons donc pas encore parler de statistiques. Heureusement, pour l’instant, ça fonctionne, nous sommes ravis. Nous espérons que cette fréquentation se stabilise, soit pérenne. Actuellement, c’est encore l’effet nouveauté. Nous avons investi 11 millions d’euros pour ce spa ! LES PLUS ET LES MOINS DE LA CRÉATION Le plus compliqué dans la création de notre spa a été toute la technique du bassin : les filtrations, les pompes qui ont dû être apportées, etc. C’était du jamais vu ! Le labyrinthe a été particulièrement compliqué. Il y a des jets qui poussent, c’était très compliqué pour les techniciens d’avoir une filtration suffisamment puissante… Par contre, ce qui nous a procuré le plus de plaisir dans la construction de ce spa, c’était le premier jour quand nous avons dessiné ce spa sur cette feuille et que nous nous sommes dit : « Maintenant, on fait ce qu’on a envie de faire. Et on le fait comme on en a envie ». C’est nous qui avions les rennes et aussi les équipes qui nous ont suivis jusqu’au bout de toutes nos folies. Notre projet nous a quand même pris plus de deux ans de réflexion. Nous avons mis sur la feuille toutes nos idées dont certaines étaient un peu trop folles. Ainsi, nous voulions faire un tunnel encore plus mystérieux, et nous voulions même que les clients passent sous l’eau en-dessous d’un mur pour arriver dans une salle secrète ! LA RENTABILITÉ D’UN SPA On entend souvent dire qu’un spa hôtelier n’est pas rentable. Mais le nôtre l’est, il permet de redynamiser tout l’établissement, les nuits d’hôtel, le restaurant. Nous travaillons beaucoup avec une clientèle de day spa dans la journée. Nous sommes complets trois mois à l’avance, ça prouve notre succès. Nous avons des clients qui viennent à l’hôtel pour profiter du spa. Le spa participe vraiment à l’originalité de tout l’établissement. Les clients qui viennent chez nous, de 5 ou 500 km, viennent pour vivre une expérience : loger à l’hôtel, prendre un petit-déjeuner, un déjeuner ou un dîner au restaurant et passer la journée au spa. Alors, oui, le spa est hyper rentable et aide à rentabiliser l’hôtel. Non seulement, il attire de la clientèle à l’hôtel, mais, en plus, il est payant. L’entrée du spa pour les clients de l’hôtel, comme pour les clients extérieurs, est payante : 90 € avec le repas pour les clients extérieurs, et 60 € par chambre (deux personnes), sans le déjeuner, pour les clients de l’hôtel. Les clients de l’hôtel bénéficient donc d’un tarif préférentiel. De plus, les clients à la journée font souvent un soin. Et bien que nous ayons neuf praticiennes, il nous en manque. La demande de soins est très importante. Nous avons déjà réussi à fidéliser une partie de notre clientèle. Même avec le tarif de 90 €, ils reviennent. Nous avons des clients qui sont déjà venus deux fois, trois fois, quatre fois en moins d’un an ! Nous n’avons pas augmenté le tarif de nos chambres, suite à l’ouverture du spa. Le Yonaguni est vraiment un très grand spa. Le maximum de clients, c’est cent par jour ! Le Night Spa Nous sommes sur une nouvelle piste de développement. Nous voudrions créer un nouveau produit qui serait le Night Spa. Actuellement, nous sommes ouverts jusqu’à 20 heures. Dans le cas du Night Spa, il y aurait un accès au spa jusqu’à 22 heures tous les soirs. Ça nous permettrait d’accueillir des clients en plus en soirée. Nous sommes en train de travailler sur ce projet : ce serait comme un afterwork. Les clients viendraient au spa après leur travail, prendraient une coupe de Champagne, un petit toast de foie gras et après iraient dans la piscine jusqu’à 22 heures. Les coffrets-cadeaux Ce qui fonctionne beaucoup chez nous, c’est le format coffret-cadeau. Quand les clients viennent au spa et passent une bonne journée, ils achètent un coffret-cadeau à 90 € pour l’offrir à quelqu’un d’autre. Et la personne qui a reçu un coffret-cadeau rachète à son tour un coffret-cadeau qu’elle va offrir à quelqu’un d’autre ! C’est le bouche-à-oreille. Ce côté coffret-cadeau a explosé totalement pour nous. Actuellement, nous avons plus de la moitié de nos clients qui viennent avec un coffret-cadeau ! Nous avons quasiment une réservation assurée à chaque fois. Un client qui vient assure une nouvelle réservation. Les clients des coffrets-cadeaux en achètent systématiquement un après leur soin ! LE CHOIX DE GEMOLOGY Nous sommes vraiment en accord avec Gemology sur ses concepts. Gemology travaille avec les minéraux, sur le concept de l’eau, la pierre. Nous aussi. Ses produits sont très efficaces, ils ont une sensorialité qu’on adore et qui plaît énormément. Et, au-delà de ça, il y a une vraie technique, des manœuvres qui plaisent beaucoup, les soins sont uniques, ainsi que le principe des massages aux pierres. Ce qu’on apprécie aussi, c’est que Gemology n’est que dans des établissements 4 et 5 étoiles de luxe, c’est une marque haut de gamme. C’est important pour nous. Nous avons un réel accompagnement avec Christelle Lannoy et toute son équipe. Elles sont là quasiment au quotidien avec nous. Elles nous ont aidés pour l’élaboration de la carte des soins en mettant au point des soins personnalisés. Nous sommes d’ailleurs en train de travailler sur une gamme de produits totalement personnalisés pour le Yonaguni. C’est vraiment ce que nous aimons chez Gémology : sa sélectivité, sa personnalisation. Cela va jusqu’au bout, Chrystelle Lannoy est à l’écoute de nos attentes. Elle a créé un soin signature, Le Rituel à la Mousse. Il se réalise dans le bain turc, la spa praticienne effectue un gommage au sel de Gemology, rince à la douchette et produit un nuage de mousse, et enfin réalise des manœuvres sur le marbre chaud. Gemology est une marque très complète avec des soins visage et corps. De plus, la vente marche bien. Nos spa praticiennes donnent une ordonnance à leurs clients. Elles ont un quart d’heure entre chaque soin pour avoir ce temps pour la vente. Ce diaporama nécessite JavaScript. UN SITE DÉDIÉ AU SPA Contrairement à certains hôtels dont le spa n’est qu’un onglet de plus sur leur site Internet, nous, nous avons un site dédié uniquement au Yonaguni Spa, parce que, avant tout, c’est une destination bien-être à part. Certes, il fait partie de l’Hôtel du Parc, mais nous le vendons comme une entité, d’autant que de nombreux clients viennent de l’extérieur. Le spa est quasiment indépendant. Nous avons une réception indépendante. La gestion des réservations et l’accueil des clients se font directement au spa. Le suivi des réservations, la facturation, l’encaissement, tout se passe au spa. Tout est fait de façon indépendante. LE SECRET DE LA RÉUSSITE DU YOGANUGI Le secret de notre réussite, c’est d’avoir créé un produit avec une belle infrastructure, et surtout soigner l’accueil au quotidien, pour que chaque client qui arrive au spa ne soit pas déçu par rapport à ses attentes. C’est ça notre challenge tous les jours : faire venir le client, lui faire passer une belle journée et qu’il ait envie de revenir. Fidéliser, fidéliser, c’est quand même la base ! Au spa, nous avons neuf spa praticiennes, plus la spa manager, plus cinq personnes à l’accueil du spa, plus un responsable du restaurant du spa, plus cinq personnes au restaurant du spa, plus la maintenance, et il nous en manque ! Même avec neuf praticiennes, c’est un souci. La demande de soins est importante. CONCLUSION Le plus beau compliment qu’un client puisse nous faire après un moment au Yonaguni, c’est : «On n’a jamais vu ça, on a été bluffé !». Voilà, c’est d’avoir surpris le client. S’il a été surpris et ravi de son expérience, c’est la meilleure des choses. L’HISTOIRE DUNE FAMILLE COURAGEUSE Notre hôtel, c’est une histoire familiale. C’est ma grand-mère et mon arrière-grand-mère qui ont créé l’hôtel, en 1954. Après la guerre, elles étaient veuves toutes les deux. Ma grand-mère avait 30 ans. Elles ont créé l’hôtel ensemble. Elles avaient un tempérament de feu, elles n’ont fait que travailler, travailler. Elles se sont dit « On va prendre le taureau par les cornes » et elles ont emprunté et construit seize chambres et un restaurant. Ça fonctionnait tellement bien qu’après ça s’est développé. Pendant la guerre, ma grand-mère faisait de la résistance, elle a fait traverser la frontière à des familles juives et elle a sauvé de nombreuses personnes et, dès l’ouverture de l’hôtel, celui-ci était complet avec toutes les familles juives qui sont venues la soutenir pour l’ouverture, le bouche-à-oreille a très vite fonctionné. C’est ça qui a fait le succès immédiat de l’établissement. Mon papa avait cinq ans quand elles ont construit l’hôtel. Dès qu’il pouvait, dès qu’il arrivait à porter des bouteilles, il les rangeait à la cave. Dès qu’il a eu l’âge de servir au restaurant, il a servi les clients. Dès qu’il a eu l’âge d’être en cuisine, il a repris la cuisine. Puis il a rencontré maman qui a rejoint l’entreprise et a continué à la faire développer. Papa était très innovant et précurseur. Notre hôtel a toujours eu une longueur d’avance sur tous les hôtels de la région et il a toujours été connu pour ça !