Une personnalité singulière du monde du wellness

Par Galya ORTEGA.

Il est passionnant de tisser le fil de sa vie professionnelle en s’appuyant sur le respect de ses valeurs naturelles et son appétit de connaissance et d’excellence. C’est ce que partage avec nous Nathalie Bouchon-Poiroux. Voici l’itinéraire d’une créatrice de soins signature et formatrice holistique.

DES ÉTUDES QUI PRÉCISENT UNE VOIE

Nathalie Bouchon-Poiroux

Nathalie Bouchon-Poiroux

J’avais besoin de voyages, d’imaginaire, de cultures étrangères. J’étais déjà passionnée par le massage notamment ayurvédique indien. L’inde m’attirait. J’ai commencé mes études par l’Institut des Langues Orientales afin d’apprendre une langue indienne et notamment l’hindi, l’une des trois langues parlées en Inde.
Le désir de voyager et de découvrir une culture étrangère m’habitait. J’avais vraiment envie de comprendre la tradition indienne. Donc, pendant quatre ans, j’ai étudié l’hindi à l’INALCO (Institut National des Langues et Civilisations Orientales). J’étais formée au massage.
Tout cela fut très appréciable pour comprendre l’Inde mais également notre culture occidentale.
À l’issue de mes études, j’ai décidé de faire une expérience terrain.

Voyage exploratoire en Inde

Je suis partie en Inde une année entière. La maîtrise de la langue, la compréhension d’une manière de vivre différente de la mienne, une approche psychologique nouvelle, tout cela fut fondateur de mes choix d’études ultérieurs. Les Indiens ne font pas de différence ni de hiérarchie entre le corps et l’esprit. Tout cela est intimement lié. On retrouvait cela dans le yoga, dans les comportements au quotidien, dans la vision de la vie tout simplement. Cette conscience-là ne m’a pas quittée et a influencé mon choix de faire plus tard des études poussées de psychologie.

L’alliance du corps et de l’esprit… toujours

De retour en France, j’ai étudié d’autres types de massages, ainsi que la médecine ayurvédique et j’ai entamé des études de psychologie jusqu’à obtenir un DESS de psychologue clinicienne. Le corps et l’esprit étaient indissociables pour moi et mon mémoire de fin d’études fut consacré aux effets bénéfiques du massage pour les bébés prématurés. J’ai travaillé sur ce sujet dans l’unité de néonatalité de l’hôpital de Pontoise et nous avons observé que le massage régulier augmentait de 50 % la survie des grands prématurés par rapport à ceux qui n’étaient pas massés. Ces expériences me passionnaient. Je ne pouvais pas imaginer une vie professionnelle sans cette orientation que je vivais comme fondamentale.

LA NAISSANCE DE CINQ MONDES

J’ai rencontré Jean-Louis Poiroux lors de séminaires organisés par ma professeure ayurvédique. Peu de temps après notre rencontre, il m’a dit qu’il avait un projet de modèle original de spa ouvert sur les médecines traditionnelles du monde dans lequel il aimerait m’intégrer. J’ai trouvé cela enthousiasmant. Cela a abouti quelques années plus tard à Cinq Mondes.

Se former, encore et toujours…

Nous sommes partis pour un voyage autour du monde dédié à l’approfondissement des médecines traditionnelles qui a duré un an. Nous avons appris le massage thaï traditionnel à Chiang Maï durant des mois, passant du niveau élémentaire au « teachers training », puis nous avons approfondi le massage ayurvédique en Inde (à Varkala, à Pune et à Bengalore), et les remèdes de beauté à Bali. J’ai enrichi mes connaissances à Tahiti pour découvrir les rituels des médecins traditionnels polynésiens…. De retour en France, j’ai continué à me former avec Lyao, un maître de médecine chinoise, et de qi gong, puis en shiatsu avec Maître Ohashi. Mon parcours s’est déroulé sur ces critères-là : curiosité et apprentissage.

Mon parcours s’est déroulé autour de la curiosité et de l’apprentissage

Faire du bien pour donner du sens

Cinq Mondes s’est construit ainsi : des soins authentiques issus des médecines ancestrales, des produits créés à partir de recettes traditionnelles et revisités par les laboratoires français avec des critères respectueux de la législation et des goûts occidentaux. Nous nous sommes développés en 2001 alors que les spas étaient embryonnaires et que tout était à construire. Nous avons fondé un nouvel art de vivre en plus d’un segment de marché. Mon expérience en Asie m’a permis de mettre au point des outils concrets pour prendre soin de soi et de sa santé grâce aux approches énergétiques. J’aime masser, concevoir des rituels complets car je me sens à ma place, dans ce que je sais faire depuis l’origine comme si tout ce qui est arrivé dans ma vie a contribué à cet accomplissement-là. J’aime faire du bien aux personnes. Cela donne du sens à ma vie et m’apporte beaucoup de sérénité.

J’aime faire du bien, cela donne du sens à ma vie

À chaque massage son voyage, ses intentions

Cinq Mondes fut l’occasion de très belles rencontres, de belles histoires qui se sont écrites sur vingt ans. Nous avons rencontré le Dr Genshayam Marda, notre médecin ayurvédique, en Inde. Il venait régulièrement en France pour nous aider à mettre au point de vrais massages signature totalement en accord avec la tradition et adaptés aux principes du bien-être dans un spa. Jean-Louis et moi définissions de quoi nous avions besoin dans la stratégie de développement des soins pour le spa, et ensuite je travaillais en collaboration avec le Dr Genshayam Marda. Nous avons avancé ainsi avec des spécialistes référents dans toutes les cultures : Chine, Japon, Bali, etc. À l’origine, il y a eu ce tour du monde qui nous a permis de poser les bases. Par la suite, nous avons fait régulièrement des allers-retours dans les différents pays avec à chaque fois une intention particulière.

De la création de protocole à des univers complets…

Au début, je créais des protocoles de massages, puis, progressivement, j’ai élaboré des univers complets, par exemple le cérémonial du Japon incluant un bain dans le O’Furo, un massage corps et un soin du visage. Quand il s’est agi de mettre à la carte le grand soin des impératrices japonaises, le kobido, au lieu de me contenter de suivre une formation, je suis remontée à la source de ce magnifique soin. Je me suis plongée dans la littérature ancienne, j’ai fait appel à mon expérience de shiatsu et à mes échanges avec Maître Ohashi. J’ai choisi les méridiens qui me semblaient les plus intéressants dans ce que nous avions envie de créer. J’ai créé ce soin avec mes trois objectifs fondamentaux : comment prendre soin de la peau, des muscles et de l’énergie à travers les méridiens tendino-musculaires. C’est ainsi que je façonne des univers via le toucher et via la beauté qui peuvent être utiles pour désamorcer un certain nombre de problématiques ou être une aide complémentaire.
J’ai adapté également le shirodhara afin que ce ne soit pas uniquement de l’huile qui coule sur le front, mais qu’il y ait un environnement global et que le client fasse une expérience profonde. Je suis entrée ainsi dans la dimension créative du soin et la prise en charge des clients.

TRAVAIL D’ÉQUIPE EN TANT QUE DIRECTRICE DE FORMATION

J’ai été directrice de la formation et responsable de la qualité des soins pour Cinq Mondes. C’est une responsabilité que j’ai prise très au sérieux, y intégrant le fruit de toute mon expérience. J’ai construit une équipe avec deux volets de compétences et d’actions :
– la formation car l’équipe allait devoir travailler avec l’ensemble de notre réseau,
– le second volet était un pôle de création avec l’équipe pour perfectionner mes créations. Avec elles, j’affinais les détails pour construire le soin final.

LE PROCESSUS DE CRÉATION

Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas toujours un nouveau produit qui génère le nouveau soin. Parfois oui, mais souvent non. Il arrive que je fasse un grand audit auprès des clients, récemment les femmes enceintes, pour que je propose un « atelier femme enceinte » avec un temps pour le papa. Ce n’était pas le marketing qui avait fait la demande mais mon écoute des praticiennes.
Un jour, Jean-Louis Poiroux me demanda un soin thérapeutique issu d’une médecine traditionnelle, s’appuyant sur le ventre. Il me poussa à réfléchir et à trouver quelque chose de fort, spécifique et répondant à une vraie de demande de nos clients. Nous avions plusieurs solutions : le chi nei tsang issu de la tradition taoïste ou l’ampuku venu du shiatsu. À ce moment-là, il y eut plusieurs articles, parutions et livres sur le microbiote intestinal, ainsi que sur la dimension émotionnelle et énergétique du ventre. Je me suis alors tournée vers l’ayurvéda et le Dr Genshayam Marda. Il m’a exposé le massage udarabhyanga qui est l’équivalent du chi nei tsang dans la médecine indienne. J’ai travaillé avec lui ce soin spécifique et après j’ai construit tout le rituel à partir de ce travail, en choisissant dans les différentes manœuvres et rythmes qu’il me proposait.

Intégration de Cinq Mondes au groupe Snow

Il y a un an, Cinq Mondes a intégré le Groupe Snow qui associe Deep Nature, leader de la gestion des spas en Europe ainsi que la marque Algotherm. C’est l’intégration dans un large savoir-faire avec 65 spas en gestion dans le monde entier. En faisant le bilan de tout mon parcours, je réalise que je m’ouvre à un nouveau challenge qui va encore m’apporter beaucoup.
Aujourd’hui, je suis directrice de l’Expérience Client et de la Qualité pour Snow Group. C’est un magnifique challenge. La Snow Academy a été créée par la direction et Cécile Troude qui en est la directrice pédagogique. J’apporte mes connaissances de globe-trotter du bien-être et de la spathérapie.

UNE EXPÉRIENCE SPA RÉUSSIE

Nathalie Bouchon-PoirouxEn tant que cliente, ce qui compte pour que mon expérience spa soit réussie, c’est que le lieu soit agréable, qu’il y ait une cohérence et une ergonomie architecturale. On n’est pas obligé que ce soit magnifique et somptueux, mais que ce soit de qualité et cohérent. Ce lieu va accueillir une grande variété de personnes et de besoins et les clients doivent se reconnaître quels qu’ils soient.
J’attends en premier lieu d’être vraiment accueillie par l’équipe du spa, et que l’on m’explique tout ce qui se passe pour moi, avec un diagnostic à la fois bien-être et beauté.
Puis, dès la prise en charge de la spa praticienne, j’attends qu’elle soit totalement à l’écoute de ce que je peux dire ou ne pas dire, qu’elle écoute mes « mots et mes maux » et dessine avec le soin une expérience corporelle, émotionnelle, voire spirituelle, inoubliable.
J’attends aussi un diagnostic beauté avec une recommandation des produits indispensables à ma routine beauté mais aussi des recommandations de style de vie concernant la nutrition, l’exercice physique, la récupération par exemple.

Conseil à une formatrice débutante

Je lui conseillerais d’abord d’approfondir les clés et la profondeur du métier de spa praticienne. Je l’inviterais à comprendre le terrain, et tout l’écosystème du wellness : comprendre les affinités entre produits et soins. On ne peut pas se dire : je veux être formatrice et ne pas avoir fait le métier d’esthéticienne ou de spa praticienne !
Puis, je l’inviterais à choisir les valeurs qui comptent pour elle et voir les marques qui les incarnent afin de choisir la voie qui a du sens pour elle-même. Et enfin, je lui conseillerais de voyager, de découvrir comment d’autres cultures travaillent le bien-être et la beauté. De plus, comme c’est un métier très physique, je l’alerterais sur la nécessité de prendre soin d’elle, de son corps, ce qui est le préalable à prendre soin des autres.

LE FUTUR DU BIEN-ÊTRE

La vision du bien-être évolue vers des soins de plus en plus experts, on parle même de santé intégrative, les clients demandent de plus en plus de personnalisation, le personnel change ses attentes sur les conditions de travail. La formation est l’une des réponses à toutes ces nouvelles aspirations.

LIBERTÉ ET MAÎTRISE

J’ai eu la chance de faire beaucoup de danse et d’équitation, ce qui a participé à mon équilibre en développant un rapport au corps dans le rythme. Ce qui n’est pas sans relation avec les notions de rythme dans la pratique du massage. J’ai commencé par la danse classique qui est une maîtrise dans la rigueur. Puis, par la suite, avec la danse contemporaine. En ce qui concerne l’équitation, j’ai pratiqué le dressage (c’est-à-dire des figures). C’était en même temps de la liberté et une forme de virtuosité maîtrisée. Mon chemin m’a plus tard amenée vers le yoga et le qi gong, qui ont renforcé ma conscience de la dimension énergétique de la santé. Tout cela me fut très utile par la suite pour pratiquer l’art du massage. J’y ai retrouvé les mêmes principes à la fois pour moi, pour gérer mon attitude de praticienne, mon ergonomie corporelle, mais également mon lien avec le corps des clients. Le masseur est une sorte de sportif de haut niveau qui doit gérer la puissance et la subtilité tout en préservant son outil de travail : son corps.

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