Par Michèle de LATTRE. Voici une belle famille : le père, Pierre Vandendruiessche, entrepreneur décorateur, et Frédéric, un de ses fils avec son épouse Mylène, qui gèrent désormais le Château de Courban. Leur point commun : l’amour du travail, un goût exquis pour la décoration, des projets fous… Le Château de Courban & Spa, à quelques pas des vignobles de Chablis et de Champagne, est idéal pour s’offrir une escapade chic à l’esprit campagne. Frédéric nous en parle avec enthousiasme. LA PHILOSOPHIE DE L’HÔTEL Tout d’abord, je considère que nous n’avons pas un hôtel, mais une Maison. Pour nous, c’est essentiel, nous voulons recevoir nos clients comme dans l’esprit d’une Maison d’hôtes. Je vais prendre un exemple précis, nous n’avons pas de numéro de chambre. Il est interdit de demander à un client son numéro de chambre. Un client, c’est M. John, et donc notre base line, c’est d' »être à la maison, loin de la maison ». Il faut que le client se sente comme s’il était, dans sa maison de campagne, et qu’il s’y sente comme chez lui. A Courban, nous avons créé une destination totalement au vert dans un petit village de cent cinquante habitants, c’est vraiment la quiétude. Les clients viennent pourquoi ? Pour un hôtel 4 étoiles que nous sommes en train de faire passer en 5 étoiles, pour une table étoilée, et pour le spa. UNE HISTOIRE DE FAMILLE ET D’AMITIÉS Le Château de Courban, c’est une histoire de famille qui a débuté en 1998. J’ai un Papa qui, à cinquante ans, a fait une crise de la cinquantaine. Il était à Lille, dans le second œuvre, il avait sept entreprises, il a tout vendu pour acheter cette bâtisse qui n’était pas habitée depuis quarante ans et dans laquelle il a fait une maison de famille. Il s’est imaginé que ses deux fils, moi et mon frère, moi j’avais 19 ans et mon frère 16 ans, nous allions venir passer tous les week-ends avec Papa et Maman en Bourgogne, alors que nous préférions aller faire la fête en Belgique. Et ses amis de Lille, pareil, ils venaient de temps en temps, mais pas tous les week-ends. Et il se fait que Courban est dans une région où il y a énormément de chasseurs. Dans le village, il y a une chasse de 150 fusils, 150 chasseurs. C’est comme ça que ça a commencé : des chasseurs sont venus frapper à sa porte et lui ont demandé s’il ne louait pas des chambres. Et là, pour mon père, ce fût un véritable bonheur, parce qu’il a retrouvé des copains avec qui il pouvait parler business, boire des « canons ». C’est ainsi qu’il a monté une maison d’hôtes. Comme c’est un homme qui a une brique dans le ventre, il a créé un deuxième étage à la maison, puis un troisième étage. En 2003, un de ses amis du nord lui a dit : « Je ferais bien le mariage de mon fils chez toi », et il a construit 800 m² de réception pour faire de la location de salle ! Année après année, le nombre de chambres a augmenté, le restaurant a été monté. Et puis, moi je suis arrivé en 2010 et je me suis très vite rendu compte que le seul moyen de développer et de créer une destination à Courban était la table. Donc, nous avons essayé différents chefs pour arriver à une rencontre avec un chef japonais avec qui nous avons passé huit ans, nous avons obtenu notre première étoile en 2018. Aujourd’hui, notre nouveau chef Nicolas Thomas, également étoilé, fait une cuisine légère avec des plats végétaux, etc. Notre souhait est d’arriver à obtenir une deuxième étoile. LA PHILOSOPHIE DU SPA Quand on entre sous le porche de Courban, jusqu’au bout du spa, on est déjà dans la même harmonie : campagne chic. Il existe beaucoup d’hôtels dans lesquels les spas sont très modernes, différents. Nous, nous avons une harmonie qui est vraiment intacte dans la continuité. Notre spa était précurseur. Et, en 2008, une Maison comme la nôtre avec un spa, c’était vraiment précurseur. D’une surface de 300 m², il comprend trois cabines de soin. L’histoire de l’hôtel se prolonge au spa. La majorité des membres du personnel sont allés au spa et ont fait un massage pour savoir comment ça se passait. Dans notre activité, le spa est le seul lieu où on ne peut pas remplacer les spa praticiennes. Elles ont un savoir-faire que les autres n’ont pas. On peut ouvrir une bouteille et dire que c’est bon, même si on ne la connaît pas, mais « Déshabillez-vous, je vais vous masser », c’est impossible ! Il faut considérer le spa comme une véritable entreprise indépendante UNE CARTE DE SOINS AVEC DES OFFRES ATTRACTIVES Nous avons une carte de soins assez longue. Je pense que la façon de présenter les soins au client doit être la plus explicite possible, mais ensuite, tout se joue lors de la rencontre entre la spa praticienne et le client, avec notamment le choix de l’intensité du massage, etc. Nous avons un soin signature réalisé avec des pierres rondes de Bourgogne. Nous vendons énormément de packages. Nous avons une offre bien-être, qui comprend la nuit, le petit déjeuner et le menu saveur pour deux personnes, deux massages de 45 minutes et un accès privatif au spa. Mais ce qui marche le mieux, c’est notre forfait qui s’appelle « Mon tout compris ». Il comprend la nuit, les petits déjeuners, le plus beau menu au restaurant avec le vin pour deux personnes, deux massages de 25 minutes, deux séances d’hydrojet, l’accès privatif au spa. Le client qui va venir à Courban va avoir une expérience complète et sait exactement combien ça va lui coûter : 550 euros par personne. Il n’y a pas de mauvaise surprise. COMMENT RECRUTER ET ATTIRER LES ÉQUIPES ? Sur notre site, nous avons un onglet « Rejoignez-nous ». Et ça marche ! Certes, nous avons des difficultés de recrutement, qui n’en n’a pas ? Mais nous avons des candidatures spontanées qui arrivent. Nous récupérons environ une vingtaine de CV par an. Pour moi, Courban, c’est un peu comme le nord, on pleure deux fois, le jour où on arrive et le jour où on s’en va ! Pour une raison très simple, c’est que nous ne sommes pas sur un spot (Courban, c’est un peu isolé, même si on est à 2h30 de Paris), mais avec Mylène, mon épouse, nous avons une façon de gérer la Maison où nous sommes très très proches de nos équipes, nous déjeunons tous ensemble tous les jours, nous essayons de donner deux jours consécutifs de repos pendant toute l’année, nous essayons de donner les meilleures conditions de travail possibles, nous logeons beaucoup de monde et dans des conditions qui sont presque celles d’un hôtel. Voilà comment nous essayons de faire venir les collaborateurs. Ils sont plutôt contents. Ils sont effrayés quand ils arrivent, parce que quand on sort de l’autoroute, on se demande s’il y a âme qui vive, mais ensuite… Cet été, nous avons logé une trentaine de personnes, ça crée une communauté et cette communauté est très intéressante pour les gens qui nous visitent… Nous avons des Indiens, des Japonais, des Mexicains, un Chilien… J’ai vécu au Mexique, j’ai des rapports avec des écoles au Mexique. Et ensuite, nous passons des annonces sur LinkedIn, et là, nous trouvons des équipes vraiment internationales. LA RENTABILITÉ DU SPA Notre spa aujourd’hui est financièrement autonome. Avant, nous avions trois praticiennes au spa et nous faisions moins de 200 000 euros, aujourd’hui, nous avons une seule praticienne au spa et nous faisons 120 000 euros. Notre spa s’équilibre. Nous sommes fermés deux jours par semaine, mardi et mercredi. Pendant la saison, nous prenons des extras. Ce ne sont pas des freelances, ce sont des spa praticiennes que nous embauchons, de juin à fin septembre. Nous avons des périodes creuses, notamment en semaine en hiver, c’est beaucoup plus compliqué. Les week-ends, nous sommes toujours complets. Les fêtes de fin d’année représentent notre plus gros chiffre d’affaires. Pour nous, le 31 décembre, si nous pouvions le faire une fois par mois, ce serait merveilleux ! Grâce au spa, nous ne faisons pas qu’avoir des nuitées en plus, nous créons aussi carrément des nuitées ! Grâce au spa, nous créons des nuitées ! Ce que nous apporte concrètement aujourd’hui le spa, c’est une visibilité. Si un client tape : hôtel/spa/Bourgogne, c’est de la visibilité. Notre spa a une particularité, c’est que notre accès sauna/hammam/Jacuzzi est privatif. Je pars du principe que si je suis avec mon épouse, je n’ai pas envie de me retrouver à 17 heures avec plusieurs personnes dans le même Jacuzzi, dans le même sauna… Pour moi, c’est quelque chose d’inconcevable. Cette privatisation est facturée 60 euros pour deux pendant une heure. Et ça passe très bien, parce que c’est une prestation où les clients sont seuls. Je pense que le spa est absolument indispensable pour un hôtel, en tout cas pour une Maison comme la nôtre, mais ce n’est pas un mal nécessaire, comme certains le disent, c’est une activité en plus. LE SECRET DE LA RÉUSSITE D’UN SPA C’est comme pour le reste, c’est avant tout, grâce à la communication et ensuite, ça va être l’originalité du spa et ce que nous allons y proposer. Nous avons un immense projet. Notre spa actuel date de 2008, il est très classique, nous n’avons pas investi dans le spa ces dernières années, parce que nous avons l’idée de créer un nouveau spa extraordinaire de 1 500 m² avec une grande terrasse végétalisée ! UN CONSEIL AUX EXPLOITANTS DE SPA Il faut considérer le spa comme une véritable entreprise indépendante et non pas comme une entreprise annexe ou obligatoire par rapport à l’hôtellerie. Un spa se doit d’être indépendant financièrement et c’est une source d’attractivité pour l’hôtel.